Votre permis de conduire peut désormais être suspendu pour une durée de 6 mois en cas d’usage du téléphone portable au volant.
Prévu par la loi LOM, cette possibilité est désormais une réalité depuis ce weekend avec la parution du décret d’application de cette mesure (Décret n°2020-605 du 18 mai 2020).
Le Principe :
Le législateur avait prévenu qu’il voulait réprimer sévèrement l’usage du téléphone au volant, c’est désormais une réalité. Si vous utilisez votre téléphone portable au volant de votre véhicule tout en commettant une autre infraction définie par le décret, votre permis de conduire pourra être immédiatement retenu par les forces de l’ordre et le préfet pourra suspendre celui-ci pour une durée allant jusqu’à 6 mois.
S’il ne fait aucun doute que le téléphone est responsable ou coresponsable de nombreux accidents, la peine n’est-elle pas un peu disproportionnée ?
En effet, les infractions prévues par le décret sont parfois mineures et ce texte donne un pouvoir immense aux Préfets qui, n’en doutons pas, en feront usage.
Au vu des difficultés toujours plus grandes pour contester les suspensions administratives et à l’engorgement des tribunaux pour manque de moyens, cette réforme est vouée à mettre toujours plus de monde sur la route sans permis de conduire.
Les infractions concernées :
Pour pouvoir suspendre le permis de conduire de l’automobiliste, il est impératif que celui-ci ait commis une des infractions suivantes de manière concomitante à l’utilisation du téléphone (nouvel article R.224-19-1 du Code de la Route) :
1° La conduite des véhicules
Cet alinéa fait référence au fait de tenir son véhicule sur la droite de la chaussée sauf circonstance particulière (dépassement etc.) ainsi qu’à l’utilisation des clignotants.
Vous avez oublié de vous rabattre sur la voie de droite sur autoroute alors que vous êtes seul ? Vous omettez d’indiquer un changement de direction par l’usage d’un clignotant ? Si vous étiez en plus sur votre téléphone à ce moment précis, les forces de l’ordre ont désormais le droit de retenir votre permis immédiatement et le Préfet peut prononcer une suspension plus longue (jusqu’à 6 mois).
2° Les distances de sécurité entre les véhicules
Cet alinéa est simple et fait référence aux fameuses distances de sécurité. En effet, tout conducteur doit maintenir une distance de sécurité suffisante avec le véhicule qui le précède afin de garantir la possibilité de freiner en cas d’urgence.
La question qui se posera concernera concrètement l’application de cette mesure. Il n’est pas rare que les distances de sécurité ne soient pas respectées du fait de la densité de circulation sur certains axes routiers. Il faudra alors compter sur la bienveillance des forces de l’ordre pour ne pas appliquer de manière trop strict ce critère.
Pour autant, il existe des situations dans lesquelles il est commun (bien que cela soit une erreur) de ne pas respecter les distances de sécurité. C’est notamment le cas juste avant un dépassement, notamment sur route nationale où il est souvent plus logique de se rapprocher du véhicule à dépasser plutôt que de passer trop de temps sur l’autre voie.
Logique ou non, il s’agit d’une des infractions permettant de suspendre le permis d’un automobiliste en cas d’utilisation de son téléphone au volant.
3° Le franchissement et le chevauchement des lignes continues
Toute ligne continue franchie ou simplement chevauchée du fait de l’utilisation du téléphone portable au volant pour faire l’objet d’une suspension de permis.
Attention à ne pas chevaucher la bande d’arrêt d’urgence sur autoroute, celle-ci pourrait désormais vous coûter cher.
4° Les feux de signalisation lumineux
Le passage d’un feu rouge mais aussi d’un simple feu orange sont désormais des infractions prévues par les textes et permettant au Préfet, cumulées à l’utilisation du téléphone portable, de suspendre le permis de conduire du contrevenant.
5° Les vitesses autorisées
Tout dépassement de la vitesse autorisée alors que le conducteur faisait usage de son téléphone permettra une suspension de permis pouvant atteindre 6 mois.
Qui peut dire qu’il n’a jamais dépasser la vitesse autorisée dans une « zone 30 » ?
Pire encore, l’article R.413-17 du Code de la Route prévoit que tout conducteur doit toujours rester maître de sa vitesse.
Ce texte est la base de l’infraction connue sous le nom de « vitesse excessive eu égard aux circonstances » et qui signifie qu’un agent assermenté a, sans aucun appareil de mesure, conclu que vous vous déplaciez à une vitesse trop élevée.
Si cette infraction n’entraîne pas de retrait de point, sa seule constatation par les forces de l’ordre pourra désormais suffire au Préfet pour suspendre votre permis de conduire.
6° Les règles du dépassement
Cet alinéa concerne toutes les règles du dépassement et notamment les distances minimales, l’indication du dépassement, ou le lieu de celui-ci.
Tout dépassement qui ne serait pas parfaitement en règle pourra servir de base de sanction en cas d’utilisation d’un téléphone.
Cette infraction prendra tout son sens sur les périphériques des grandes agglomérations sur lesquels les dépassements sont rarement effectués parfaitement en règle.
7° Les signalisations imposant l’arrêt des véhicules ou de céder le passage aux véhicules
Il s’agit la du respect des panneaux « stop » et « cédez le passage ».
Evitez donc le stop glissé qui consiste à ne pas marquer l’arrêt total du véhicule à l’aplomb de la ligne blanche.
8° La priorité de passage à l’égard du piéton
Ce dernier alinéa concerne le non-respect de priorité qui doit être donné aux piétons aux abords des passages protégés.
Cette infraction, sanctionnée par la perte de 6 points depuis peu de temps et posant plusieurs difficultés vis-à-vis de sa matérialité ne manquera pas de créer des difficultés puisqu’elle permet, comme les autres infractions susmentionnées, la suspension du permis de conduire du contrevenant.
Conclusion :
Le téléphone portable est dangereux au volant et il est essentiel de pouvoir endiguer ce phénomène afin de réduire les accidents qui y sont liés et qui pourraient être facilement évités.
Pour autant les mesures prises par le gouvernement avec ce décret risquent d’avoir de graves conséquences pour de très nombreuses personnes sans avoir pour autant les moyens de se défendre.
En effet, le pouvoir de sanction est donné au Préfet et non à un juge.
Le Préfet représente l’Etat et ne tient aucunement compte de la situation des automobilistes et de leurs besoins réels.
Si l’intention est louable, la mise en place laisse grandement à désirer.
En cas de suspension de votre permis de conduire, notamment pour usage du téléphone au volant, contacter votre avocat en droit routier dans les meilleurs délais afin que celui-ci vous aide à entreprendre les bonnes démarches pour conduire à nouveau.